Un conte pour Soissons … Le Luthier de Soupir

Au fond d’une boîte rangée dans un placard, j’ai retrouvé un conte que j’avais écrit. Je dois l’inspiration de ce petit récit au célèbre « Joueur de flûte de Hamelin ». J’espère qu’il vous plaira …

Le luthier de Soupir

L’Aisne est une région rurale et parsemée de bois et d’étangs d’eau.

Jadis aux temps anciens elle fît la fierté de ses Rois et la prospérité de ses sujets.

Des villes prestigieuses comme Soissons, Laon, La Ferté-Milon ou encore Saint-Quentin pour ne citer qu’elles s’y formèrent et s’y développèrent.

La lignée royale des Mérovingiens, avec Clovis comme premier Roi des Francs fonda le berceau de la nation Française.

De grandes maisons grandirent à mesure que le Royaume Catholique Français ne se développe et aujourd’hui encore, des localités portent dans leurs particules les mentions de « Coucy » ou encore de « Valois ».

Châteaux, abbayes et cathédrales s’épanouirent à la croisée des chemins s’étendant du nord de l’Europe à l’Italie Septentrionale et à Rome et du Saint-Empire Romain Germanique à l’Andalousie Mauresque.

Marchands, forains, ménestrels, paysans, religieux et guerriers allaient et venaient d’un bout à l’autre du Royaume et il n’était pas rare que des êtres malfaisants ne profitent de ces mouvements, pour commettre leurs funestes projets.

Un enfant marchait le long d’un cours d’eau.  Les pleurs d’un vieil homme solitaire attisèrent sa curiosité, ce qui soit dit en passant, est une qualité à cet âge.

-Ancien, pourquoi marches-tu seul au milieu des bois ?

-Je viens pleurer mes amis disparus.

-Etaient-ils vieux ?

-Ils n’étaient pas plus âgés que toi mon fils …

L’enfant ouvrit grand ses yeux et s’assit sur un rocher.

-Il y a fort longtemps, un siècle peut-être, Soupir s’étendait des deux côtés de la rive que tu vois-là, par-delà les sous-bois et dominait une vallée remplie de vergers, avec des troupeaux de belles vaches.

Les villageois qui peuplaient ce bourg étaient si riches et si gras qu’ils en avaient oublié les règles élémentaires de la courtoisie et de l’hospitalité.

Jean-le-Bon était le Seigneur de cette contrée et sa bedaine était aussi imposante qu’il en était hautain.

Du château depuis lequel il siégeait, il ne reste plus que la pierre sur laquelle tu es assis…

Chaque samedi, la veille du Jour du Seigneur Notre-Père, un marché s’établissait et les paysans échangeaient les surplus de leurs récoltes contre des épices et des fourrures de pays lointains.

Un beau jour de Septembre, un maître luthier se présenta sur la place et sortit un instrument de sa main faite. Gravures, vernis et essences de bois ébahirent l’assemblée et quand l’artisan joua de son luth, la résonnance du caisson et les sons qui en ressortaient, impressionnèrent le Seigneur.

Les festivités locales approchaient et enchanté par la beauté de l’ouvrage, Jean conclu un marché et lui commanda trente luths, pour les trente jours du mois.

Maître luthier respecta ses engagements et travailla trente jours et trente nuits, tandis que les autres s’enivraient tous les soirs durant. Le temps pressait mais il continuait à s’époumoner et à s’épuiser, et vînt enfin à bout de sa besogne au temps voulu.

 -Nous t’avons nourri et nous t’avons logé, prend donc ces cinq ducats et va-t’en en profiter, car tu l’as bien mérité.

-Eminence, ces cinq ducats représentent le prix d’un seul jour de travail.

-Puisque tu sembles bien buté, reprend donc tes instruments et va les vendre à acheteur moins avisé.

-Mon âne porte déjà péniblement deux luths et mon sac de voyage, comment voulez-vous que je puisse traverser les routes de notre bon Roi sûrement et sans embuche.

Le Seigneur fît jeter le pauvre homme, qui chemin faisant croisa la route des hommes à rouelle, bandits de grand chemin sans cœur et sans honneur.

Ils le battirent, le secouèrent et perdirent patience lorsqu’ils s’accordèrent à dire que le luthier n’avait que pour seules richesses, son âne, son savoir et ses objets.

La nuit était froide alors ils firent un feu avec le bois des luths.

Les ventres étaient vides alors ils mangèrent l’animal au coin du feu.

Et quand ils eurent terminé le tonneau de vin, pour se divertir, jetèrent à la rivière, pieds et poings liés, le pauvre bougre qui se noya.

Un mois passa et pendant qu’enfants nous préparions la fête du village, une mélodie rythmée et enivrante nous fît danser en gestes saccadés. 

Nous étions trente-et-un et quand au bord de l’eau nous arrivâmes, le fantôme du luthier cessa de jouer et les trente enfants avec lesquels j’étais marchèrent au milieu de l’eau et à jamais disparurent emportés par les courants.

Le soir même à la place du marché, paysans et marchands, bâtons de bois et fourches de pailles s’en retournèrent auprès du Seigneur.

-Qu’est-il advenu à notre descendance ? Demanda le plus respecté des fermiers.

-Demandez-donc au jeune garçon !

-J’étais le trente-et-unième et le luthier a finalement épongé votre dette, car trente luths pour trente enfants, voilà le prix à payer pour votre sottise et votre mensonge. Qui ne tient pas sa promesse et contracte des dettes sans jamais les payer, un jour ou l’autre expose ses propres enfants.

Les paysans alors furieux brulèrent le château du noble et s’en allèrent au bord de la rivière pour achever de rembourser la dette.

C’en était trop tard, les trente luths flottaient au bord de l’eau, Jean-le-Bon jeté dans la rivière, rejoint un torrent et bientôt le Styx, aux-côtés des innocents et du luthier.

Vois-tu enfant, la morale de toute cette histoire ?

-Que les dettes dues par les parents finissent toujours par être payées par les enfants.

-Et que les enfants sont la seule richesse en ce monde, car après ce temps, tous vieillirent et moururent année après année, laissant un village sans descendance et sans avenir, qui alors s’éteint délicatement comme la lumière de la bougie.

Projet d’écriture 2019/2020

Après la sortie le 26 Août 2019 du roman fantastique Yolande et disponible sur Amazon KDP Sélect, j’ai décidé de poursuivre l’aventure dans la sinistre ville de Mortcy.

J’avais une contrainte particulière pour Yolande, qui était l’autocensure pour un récité devant respecter certaines règles pouvant choquer les lecteurs. Pour un roman fantastique/horreur, il est assez facile de basculer dans le gore et l’obscène. J’ai donc dû me conformer au règlement et filtrer certains aspects quant à la réalisation de mes idées.

Après Yolande, vient la suite car comme un proverbe mortycien le dit si bien : « tous les chemins mènent à Mortcy ». Jonas dans le premier opus, est un jeune enfant malade de neuf ans, atteint de mucoviscidose.

J’ai voulu davantage tourner l’intrigue autour de ce garçon à présent dans l’âge de la puberté et qui vient enfin de trouver une famille adoptive, après quatre années à être ballotté de familles d’accueil, en familles d’accueil et d’orphelinats en foyers.

C’est un enfant qui a un passif et qui est sur le point d’affirmer sa personnalité. Autant dire, ce roman sera bien plus violent et cru que Yolande. J’envisage de mettre en scène des passages moins « édulcorés » et de mettre l’accent sur des scènes sanglantes.

Je vous tiendrai au courant de l’avancement de mon projet d’écriture de temps à autres.

En attendant, si vous ne l’avez toujours pas lu, Yolande est disponible sur Amazon KDP Select, alors si vous avez un abonnement, n’hésitez pas et faites un voyage mental dans les environs de Mortcy …

Yolande

Le roman Yolande est en lice pour le concours des Plumes Francophones 2019

Salut à toutes et à tous !

Comme certains d’entre vous le savent déjà, j’ai récemment publié un roman de type fantastique et qui s’intitule « Yolande », sous le pseudonyme de Sam Atticus.

Il est en lice pour le concours des Plumes Francophones 2019 et je serai vraiment ravi de vous en faire profiter en « avant-première ».

Le roman Yolande est en accessible sur Amazon KDP Sélect, téléchargeable sur KDP et également disponible en format broché.

N’hésitez pas à en parler autour de vous, à partager et à me laisser un commentaire, si ce roman vous a plus !

Il est accessible depuis ce lien : Yolande

Vous pouvez également me suivre sur mon compte Instagram, en tapant le hashtag : #samatticus1986

ou #Yolande2019

Je vous ferai prochainement un retour avec un article sur le concours des Plumes Francophones, je n’ai as eu l’occasion de m’y pencher davantage pour le moment 😉

Le Paon d’Or, une nouvelle fantastique de Sam Atticus

J’ai décidé de vous partager une petite nouvelle fantastique (5000 mots) que j’ai écrite cet été. J’espère qu’elle vous plaira 🙂

Le Paon d’Or

Suicide en Forêt de Retz du sexagénaire condamné pour le meurtre de son épouse. Monsieur Van Halen avait violemment battu, lacéré et frappé à l’aide d’un objet contondant la victime. Il venait d’être remis en liberté récemment, après avoir purgé une peine de quinze ans de prison. L’homme a toujours clamé son innocence en dépit des nombreuses charges contre lui.

Journal de Basse-Picardie, Soissons, le 07-09-2016

Voilà une quinzaine d’années de cela, Bois-le-Roy, paisible commune du grand Soissonnais, fût le théâtre de ce que l’on présenta dans la presse nationale comme un énième drame conjugal dont l’époux nia jusqu’à encore récemment, c’est-à-dire à sa mort, sa responsabilité. Les habitants des environs abondèrent en faveur de la version du mari, ce qui leur valu d’être traités au mieux de faibles d’esprits, et au pire, d’esprits étroits vivant encore en des temps archaïques rabaissant le sexe féminin à un rang inférieur donnant droit de vie ou de mort au sexe dominant.

Il nous a paru honnête de retranscrire dans les présents écrits les faits, tels qu’ils se sont déroulés, après une étude minutieuse des différents éléments nous ayant été fournis par une abondante série de preuves, démontrant de façon formelle, l’innocence de Serge Van Halen. L’affaire du « Paon d’Or », comme nous l’appelons dans notre cabinet, relève selon nous davantage, une fois encore, de l’absurdité et de la stupidité d’enquêteurs trop imbus de leur personne, que d’un véritable travail de fond.

*

Maître Leroux, en sa qualité de notaire dans les environs de Villers-Cotterêts, désigna Amélie Blanchard légataire universelle de la succession du Docteur Bérénice Hagger.

La septuagénaire, amie de longue date des époux Blanchard-Van Halen, que nous désignerons comme époux Van Halen au cours du présent récit, vieille fille et dernière de sa lignée, souhaita qu’Amélie prenne part aux destinées de son abondant patrimoine. Dr Hagger était une naturaliste Germano-Suisse de grande renommée ayant longtemps exercé son métier aux confins du Pacifique, et notamment dans l’Archipel Indonésien, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et les Iles de Salomon. Elle laissa à la fin de sa carrière une extraordinaire compilation d’études sur la faune et la flore locale, encore assez bien préservée des destructions humaines, notamment dans les territoires les plus difficilement accessibles et exploitables. Cette remarquable scientifique répertoria ainsi une quarantaine d’arachnides inconnues, au moins autant de reptiles anciens, une vingtaine d’espèces d’oiseaux et une cinquantaine de plantes endémiques. Elle mourut accidentellement en chutant des hauteurs d’une falaise, localisé sur une minuscule pointe de rocher, non répertoriée par les cartographes des Iles de Salomon.

Les époux Van Halen, férus de sciences et de voyages en territoires hostiles, firent la connaissance du docteur voilà une trentaine d’années, de façon tout à fait improbable. Alors qu’un cyclone s’abattit sur l’Ile de Java, ils évoquèrent leur région d’origine, dans laquelle Madame Hagger possédait sa résidence en dure, une vieille bâtisse héritée de ses grands-parents maternels. Epris du savoir et de l’abnégation de la scientifique, ils avaient à plusieurs reprises financés de manière conséquente les travaux de la désormais défunte dame. Elle les gratifia en retour de ce don sensé couvrir au moins une bonne partie de l’argent qu’ils avaient investi en elle.

Amélie se présenta donc dans la résidence de la donatrice, s’étonna d’abord du peu d’entretien des espaces verts, manifestement laissés à l’abandon depuis quelques années déjà et gagnés par les ronces et même quelques jeunes pousses d’arbres répandus anarchiquement. Elle pénétra dans le hall d’entrée du logement, une espèce de longère en briques de terre rouge à toiture en tuiles noires, et n’y trouva rien, si ce n’est un couloir menant à une porte desservant une pièce principale, faisant à la fois office de salon, cuisine et même bureau de travail. Le bureau qui remplissait l’immense majorité de l’espace, soit probablement les trois quarts d’une bonne soixantaine de mètres carrés, attirèrent l’attention de l’héritière.

Autour du bureau fait en bois de manguier, un nombre considérable de cadres contenant des variétés de plumes d’oiseaux exotiques qu’elle n’avait jamais vu auparavant. Larges plumes vertes tachetées de cercles orange, des aigrettes violacées, des panaches blancs et or, des papillons noirs, rouges, multicolores, et des cartes de géographie anciennes des confins des terres australes. Une pile de livres disposés depuis le sol et s’élevant à près d’un mètre-cinquante, un siège de bureau dont le cuir usé par le temps, rendirent l’assise d’Amélie inconfortable lorsqu’elle prit place dessus. Les plafonds des murs étaient couverts de poussières et de toiles d’araignées, le laboratoire intime du Dr Hagger évoquait un lieu unique regorgeant de trésors. Disposé au milieu du bureau, un grand classeur contenant les derniers travaux retranscrits par la scientifique, documentés de photographies, de ses textes manuscrits, de notes plus ou moins succinctes…

Contre le mur une petite boîte en bois, dans laquelle étaient rangés des petits sachets de graines de plantes exotiques, avec leurs noms et une numérotation ramenant à un livret rédigé par la naturaliste. Une clé cachée au fond de la petite boîte, intrigua l’épouse Van Halen, qui bientôt l’utilisa pour ouvrir la porte d’une étagère disposée à sa droite. La serrure claqua et lorsqu’elle poussa le battant de la porte, posé sous une cloche en verre, dans une assiette en laiton ciselée aux aspects de plumes de paon, un œuf blanc aux reflets dorés la fascina. Les animaux inconnus empaillés rangés autour de l’intrigant objet ne provoquèrent pas le moindre intérêt auprès d’Amélie, qui se saisit de l’objet, avant de refermer la porte du meuble. Elle balaya brièvement du regard la pièce et retourna dans sa voiture, s’empressant de présenter à son époux l’objet de sa trouvaille.

*

-Il y a écrit sur une petite étiquettes colée à l’arrière de la coupelle « Pavo Orus/ Phasianidés Royal », c’est-à-dire Paon d’Or. Dit Amélie, en présentant l’objet à son époux.

-Un paon d’or ? Je n’ai encore jamais entendu parler d’une espèce de ce genre, pourtant je m’y connais en matière d’ornithologie.

-Penses-tu que nous devrions le présenter à un laboratoire ? Peut-être que des spécialistes pourraient nous éclairer davantage sur la nature de l’objet.

-A mon avis, ce serait une belle erreur. Il doit s’agir d’un objet de décoration, une œuvre d’art ou un truc du genre. Quand bien même ce serait un œuf d’une espèce rare, nous ne serions pas plus avancés et ils se l’approprieraient.

L’époux s’empressa tout de même de vérifier dans ses livres anciens qu’il conservait jalousement dans sa bibliothèque, et, après quelques heures de recherches, redescendit les escaliers le visage radieux et la mine victorieuse. Il présenta à son épouse un vieil ouvrage poussiéreux, dont la couverture en cuir noirci par le temps, indiquait « Almanach de Sir Marcus Wellington- traduit de l’Anglais en Français par le Professeur François Gillet de Chamberlain ». L’ouvrage publié lors du dernier quart du dix-neuvième siècles, avait été écrit par l’explorateur et navigateur Sir Wellington dans les années 1860.

L’épouse Van Halen marqua une expression circonspecte, devant l’étonnante crédulité de son mari, mais feint malgré tout d’être à son tour étonnée par cette trouvaille. Serge posa son pouce droit dans sa bouche et le lécha abondamment, avant de tourner disgracieusement les pages jaunies du vieux livre. A la page deux-cent-soixante-sept, il était formel, le marin britannique décrivait ce qui se trouvait désormais sous leur toit : un œuf de Paon d’Or.

« Le Paon d’Or, animal autrefois révéré et vénéré par les Pieds Rouges, tribu désormais disparue, était considéré sur l’Ile de Jalomoss, comme un dieu à l’appétit insatiable, sujet à la colère et à la cruauté. D’après les différentes variantes mythologiques des îles voisines, les Pieds Rouges pratiquaient le rituel anthropophage et se nourrissaient de la chaire de prisonniers issus des peuples vaincus. »

Amélie sembla encore davantage perplexe après la lecture de l’article présenté par Serge, et fit tourner son indexe près de sa tempe en levant les yeux au ciel. M. Van Halen tenta de justifier sa trouvaille en lui rappelant que bien des ouvrages anciens détenaient une étonnante littérature sur des phénomènes aujourd’hui oubliés, et qu’il était dommage de ne pas donner plus de crédit à la thèse avancée par ce célèbre explorateur dont on n’avait malheureusement jamais retrouvé la dépouille.

Les Van Halen possédaient ce qu’il convient d’appeler une belle propriété, de style anglo-normand, avec les murs du rez-de-chaussée ainsi que les pignons constitués en pierre de taille blanche. Les deuxième et le troisième étages, étaient quant à eux faits de poutres de bois en colombage, soutenant une toiture à trois pans. A l’arrière de cette demeure bourgeoise, une véranda aux allures d’orangerie, maintenait une luxurieuse végétation composée notamment d’agrumes. Le manoir était entouré de vastes espaces de verdures de plus d’un hectare, avec tout au fond, une volière à colombes et tourterelles, un petit pigeonnier et une basse-cour. Entre cet espace dédié à la passion de Serge et l’orangerie d’Amélie, une belle fontaine rococo dont des jets d’eau accompagnant les chants des oiseaux, rendaient l’endroit paisible et somptueux.

Ils s’accordèrent sur l’emplacement à réserver à l’étrange objet et le placèrent, disposé près de la fenêtre la plus au sud, sur une table basse. Les reflets du soleil réfléchirent de telle sorte que la coquille de l’œuf sembla étinceler. Amélie et Serge restèrent une bonne demi-heure à observer inlassablement le précieux trésor légué par le Dr Hagger, s’interrogeant sur sa provenance et son origine. Il sembla à Serge entendre un bruit sourd et étouffé issu des entrailles de l’œuf, ce à quoi répliqua Amélie qu’il avait passé l’âge de ces enfantillages. La nuit tomba, une fois encore l’époux Van Halen pensa ou du moins cru entendre des piaillements d’oiseaux en provenance de la véranda. Il descendit délicatement les marches des escaliers, afin de ne pas réveiller son épouse et s’approcha de l’œuf, intacte et incontestablement sublime. Les miroitements des faisceaux lumineux de la lune sur la coque, illuminaient la vitre devant laquelle le précieux objet était disposé. Il s’assit sur un fauteuil situé à proximité et resta là, à le contempler béatement. Ce fût son épouse qui le réveilla au petit matin, et qui commença à s’inquiéter sur l’état de santé de son mari. Elle déclara à Madame Galantine, quelques mois avant sa disparition, qu’elle soupçonna un comportement étrange chez Serge. Madame Galantine, avec Amélie et quelques autres de leurs amies, animaient à l’époque une association dédiée à la préservation de variétés de plantes potagères et horticoles anciennes. Leur passion ne s’arrêtait pas à la verdure, elles étaient également des colporteuses de ragots invétérées et adoraient médire des autres.

La fille cadette des Van Halen célébra son mariage au cours du mois de Juillet, ce fût l’occasion pour eux de se rendre de l’autre côté de la frontière, dans un village situé entre Chimay et Couvin, en Belgique Wallonne. Les rumeurs prétendirent que Serge passa plus de temps à montrer aux convives des photos prises sur son smartphone, dudit « Œuf de Paon d’Or », plutôt que de vanter la splendeur de sa progéniture. Cela provoqua de vives tensions au sein du couple, qui au lieu de s’émerveiller lors de l’échange des alliances, sous l’arche de fleurs, regarda chacun dans une direction opposée. Certains pensèrent assister au délitement du mariage des Van Halen père et mère, tandis que leur fille Célestine prenait la tangente en sens inverse, toutefois, lorsqu’ils rentrèrent le lendemain chez eux, ils avaient fini par se réconcilier et l’incident fût clos.

*

Les dires de l’entourage furent formels et cela contribua à la descente aux enfers de Serge Van Halen. On l’accusa à tord d’avoir occis son épouse, de la plus effroyable des façons, car il est facile de jeter aux loups le plus innocent des agneaux. Sur de simples jugements, sur un regard froncé, sur une bouche renfrognée, sur un apparent désaccord, certains ont la sentence facile. Cet homme fût condamné sur des « on-dit ». L’innocent a été bafoué dans ses droits et dans son honneur. On alla même jusqu’à calomnier le veuf qu’on accusa d’avoir voulu s’approprier le conséquent patrimoine du ménage.

*

A leur retour à Bois-le-Roy, le portail en bois massif de la propriété était bien fermé, on pouvait difficilement pénétrer par-dessus les épais murs en pierre entourant la résidence, et pourtant, Amélie aperçu au loin que les vases de ses plantes situés dans la véranda, étaient brisés à même le sol et que quelqu’un s’était livré au saccage de son espace. Serge s’empara d’une bêche à jardiner et accouru à l’arrière de la propriété qui ne présenta aucun signe d’effraction. Il fît le tour du manoir, entra dans la demeure avec prudence et quelques minutes après revînt trouver son épouse.

-Personne n’est venu, tout est en ordre mis à part ton jardin d’intérieur. J’ai retrouvé quelques petites touffes de poiles de Félix le chat. L’œuf en revanche …

-L’œuf ?

-J’ai retrouvé la cloche de verre brisée contre le sol. L’œuf est cassé en deux.

-Tu veux dire que le chat à tout détruit ?

-J’imagine. Je ne vois pas d’autres explications. Il aura sans doute tenté d’attraper une souris et provoqué toute cette pagaille.

L’œuf était vide, creux, les taches dorées, les reflets et l’aura qui l’entourait s’étaient volatilisés. Serge sembla moins enclin à un comportement étrange et cela rassura de prime abord Amélie. Ils cherchèrent en vain Félix qui incontestablement avait compris qu’il avait commis une faute lourde. Le soir, le couple alla se coucher et lorsque Serge s’endormit, un cri strident retenti du grenier, provoquant en lui un accès de terreur nocturne. « Leon !» Il se mit à trembler et à claquer des dents et ses tressaillements firent sortir du sommeil son épouse. Elle le rassura et lui assura qu’elle n’avait pour sa part rien entendu d’étrange. Elle avait l’ouïe fine et le moindre bruit suffisait en général à venir à bout de ses plus lourdes rêveries. Lorsqu’elle se rendormit, il resta les mains accrochées à ses draps, posés jusqu’à son nez. Les billes noires de ses yeux tournèrent à droite, aux abords de la fenêtre, puis au moindre craquement de tuile, au moindre grincement de bois du plancher ou de la toiture, ou d’un quelconque élément de cette vieille bâtisse, roulaient à gauche, près de la porte légèrement entrouverte dont l’épouvantable vide rendait l’obscurité pesante. Il lui sembla entendre un frottement au-dessus du plafond. Ses poiles se hérissèrent le long de tout son corps et ses muscles se crispèrent au point de frôler la crise de tétanie.

A mesure que la nuit passait, et que les hululements de chouettes aux abords de la propriété, les craquements des branches et les crissements de feuilles, les claquements des battants des volets au fenêtres accompagnaient la solitude de l’homme, il s’assoupit enfin, mais sentit son rythme cardiaque s’emballer et un poids lourd peser sur sa cage thoracique.

*

« Cette nuit-là, j’ai ressenti pour la première fois depuis bien des années, une effroyable peur se saisir de moi. Je me suis revu comme à l’époque de mes terreurs nocturnes, cela remonte aux premières années de ma vie, à l’enfance, lorsque parfois il m’arrivait de parler à voix haute durant les phases de sommeil paradoxale. Je garde un très mauvais souvenir de cette période, dans la mesure où il m’arrivait presque systématiquement de faire des cauchemars. »

Témoignage de Serge Van Halen.

*

Le matin suivant, après un sommeil particulièrement agité, Serge préféra garder pour lui l’affreuse nuit qu’il venait d’affronter. Le moindre bruit suspect sembla l’inquiéter et il se mît à tressaillir pour un rien. La disparition de Félix, qui ne s’était désormais plus manifesté depuis plusieurs jours commença maintenant à susciter l’interrogation des époux. Devant la persistance de son mari, Amélie décida de vérifier dans le grenier l’éventuelle présence de l’animal. Rien n’indiquait que le félin ne puisse atteindre cet espace, cependant l’époux prétendait entendre régulièrement des bruits de griffures contre le plancher.

Elle tira sur l’espèce de bobinette qui fît basculer un escalier replié contre une trappe, et monta doucement dans l’étage. Serge de nature anxieuse et sujet au vertige, préféra troquer sa casquette de mâle dominant, pour celui d’homme apeuré. Elle cessa d’avancer, une fois arrivée au niveau des deux dernières marches et marqua un sentiment d’admiration mêlé à celui de l’étonnement. « Viens voir, c’est absolument incroyable ! »

Elle s’empressa cette fois-ci de s’engouffrer dans la pénombre et il lui emboîta malgré tout le pas. Ils se regardèrent et restèrent pantois, leurs yeux s’illuminèrent, leur bouche légèrement ouverte, c’était la première fois qu’il leur était donné d’assister à pareil vision. Posé au-dessus d’un vieux pupitre d’écolier, celui qui avait appartenu au père de Serge, un paon regarda les deux êtres humains d’un regard à la fois étrange et docile. Amélie s’approcha délicatement de l’oiseau et caressa son aigrette dorée. Serge posa un genou sur le sol, afin de garder une hauteur inférieure à l’animal et de ne pas l’effrayer. Le paon, dont le plumage à l’abdomen bleu subjuguait le couple, gratta délicatement la planche de bois sous ses pattes, leva le bec et cria « Leon ! ». Il étala alors les plumes de sa queue et un éventail en or éclaira la pièce. Mille ocelles semblèrent scintiller au travers des rayons chatoyants lancés par l’oiseau. L’animal reprit une posture normale, sauta du pupitre et se jeta au travers de la brèche.

*

« Ce volatile, enfin, je veux dire la découverte de ce Paon d’Or, a été pour moi une délivrance. Je n’étais pas fou, je savais bien que quelque chose était caché là-haut. J’étais rassuré de savoir qu’il s’agissait d’un animal. Je suis de nature superstitieuse, même si je ne prétends pas croire aux fantômes, aux monstres … C’est une réminiscence du passé, je crois que nous avons tous quelque chose enfoui au fond de nous-même, ces vieux démons comme on dit, qui nous dévorent de l’intérieur, qui nous terrifient. On a beau les mettre en sommeil, ils dorment, attendent sagement le moment propice et reviennent vous hanter lorsque vous êtes au bord du précipice. »

Témoignage de Serge Van Halen.

*

Le volatile fût adopté comme on le fait avec un animal de compagnie, nourrit, soigné et hébergé d’abord dans la véranda, au milieu des plantes. Chétif, le paon prit une ampleur impressionnante qui obligea les époux à créer un espace à proximité des autres oiseaux du jardin. Lorsqu’il déployait sa roue dorée, son envergure dépassait dorénavant les deux mètres de haut et de large. Sa rareté et son exceptionnel plumage étaient la source de la plus grande vigilance de la part d’Amélie et de son époux. Ils prirent le parti de ne rien dire à leur entourage, de crainte qu’on leur enlevât le précieux animal d’ornement.

Plus les jours passèrent, plus la quantité de nourriture ingurgitée voracement par l’animal augmentait. Les disparitions progressives des tourterelles et du coq de la basse-cour inquiétèrent les Van Halen, qui cachèrent ça et là des pièges à renard dans leur propriété. Serge se résolût à construire dans l’une des vieilles écuries abandonnées du parc un promontoire sur lequel s’établit le paon. Le soir, à la tombée de la nuit, il fermait la porte de la nouvelle demeure de l’animal, qui grattait vigoureusement les planches de bois sur lesquels son perchoir était accroché. Les sacs de graines apportés quotidiennement finirent par être apportés au moyen d’une brouette et cela ne suffît plus à contenter la bête.

-J’ai l’impression que cet animal n’en finira jamais de se goinfrer, dit un matin Serge à son épouse.

-C’est une bénédiction que nous puissions posséder un pareil animal. Je n’avais encore jamais vu ou entendu parler d’une créature aussi fabuleuse.

-J’ai l’impression qu’il te préfère.

-Je suis la première personne humaine qu’il ait vue, je pense qu’il me prend pour sa mère.

-C’est bien connu, les oiseaux ont cette particularité de s’attacher à un seul être…

Le jour, le paon déambulait majestueusement au travers de la propriété, criant des « Leon », lorsqu’il faisait la roue et paradant fièrement sur les pelouses verdoyantes de ses terres. La disparition de Félix fût comblée par la joie et l’émerveillement qu’apportait l’animal. Lorsqu’ils avaient le bonheur d’assister au déploiement de ses mille ocelles lumineux, qu’au travers du bleu sombre du plumage de sa queue il faisait vibrer vigoureusement, Amélie et Serge semblaient comme hypnotisés et entrer dans un état de transe. Ils pouvaient rester là à l’observer une heure sans marquer la moindre lassitude, plongés dans l’admiration et suspendus aux moindres faits et gestes de sa majesté le Paon.

Rien ne sembla de trop pour l’oiseau, dont la taille finit par atteindre celle d’un énorme cygne. Un matin, Serge surprit l’animal en train de dévorer à grands coups de bec et d’ongles un lapin de garenne qui déambulait dans le jardin. Quand il eût terminé sa pitance, il tourna de méchants yeux rouges affamés en sa direction, et cria. Il déploya les plumes de sa queue et Serge resta prostré les bras ballants, observant les scintillements étoilés de la robe bleue du paon. De sa fenêtre Amélie appela son époux qui sortit de sa torpeur, alors que l’animal reprit une posture ordinaire et sembla marquer un geste de salutation de la tête et des ailes en direction de sa maîtresse.

-Je crois qu’il a besoin de protéines animales. Dit Serge à son épouse.

-C’est un volatile, il peut gratter le sol, dévorer les insectes, vers et petits campagnols. Je ne crois pas que ce ne soit une bonne idée que de pourvoir à tous ces besoins.

-Je l’ai vu s’attaquer à un lapin ce matin, il tenait dans ses serres sa proie et déchiquetait ses morceaux de chair…

-C’est un animal, il a son instinct de survie.

-N’as-tu jamais imaginer qu’il pouvait un jour représenter un danger pour nous ?

-Un rien te fait peur, Serge. Ce n’est pas un aigle non plus. Et il n’y a pas d’enfant dans la propriété.

-Il prend de plus en plus de place. On devrait peut-être le montrer à un spécialiste.

Les époux laissèrent la question en suspens, le soir lorsque Serge s’en allait fermer la porte de l’écurie, il prenait désormais soin de ne jamais tourner le dos à la bête et à regarder vers une autre direction lorsque Paon déroulait sa roue hypnotique. L’animal prenait alors une posture fragile et feint de craindre son maître en s’inclinant devant lui. La nuit, de la fenêtre de sa chambre, l’époux entendait les griffes de l’animal gratter contre les planches et cogner les pierres des murs du bâtiment avec son bec. En proie à de nouveaux cauchemars, il s’éveillait parfois en plein milieu des ténèbres et apercevait au travers des ouvertures de l’écurie, protégées par des barreaux de fer, les reflets lumineux de l’oiseau. Il eut souvent l’impression que Paon l’appelait, d’un cri de détresse que Serge interprétât comme un besoin de compagnie.

*

« Le Paon d’Or, animal associé à la mythologie des Pieds Rouges, aurait probablement existé, toutefois, on l’assimile davantage au paon de l’île de Java, animal relativement courant dans les régions tropicales chaudes et humides. Un autre éminant naturaliste britannique, répondant au nom de Sir Lewis Wallace, décrit la créature dans ses travaux d’observations de la faune et de la flore locale. Il la présente comme un volatile rusé et pouvant parfois s’attaquer à des êtres humains en posture défavorable. Sir Wallace aurait prétendu qu’un de ses jeunes moussaillons fût dévoré par un l’un de ces phasianidés, cependant, d’autres sources indiquèrent que ladite victime, fût le fils d’un de ses anciens rivaux amoureux et qu’on fît pendre le navigateur pour meurtre barbare. »

Carnets de voyages de Sir Wellington, 1867.

*

Serge raconta l’histoire qu’il avait découvert au détour de la lecture d’un de ses anciens ouvrages désuets, appartenant à sa pléthorique collection de livres. La réaction de son épouse ne se fît pas attendre et elle lui suggéra de consulter un médecin afin d’évoquer ses fréquentes angoisses qui prenaient manifestement une ampleur inquiétante. L’été toucha à sa fin et un matin, l’animal disparût en ne laissant que quelques plumes dorées sous son perchoir. Amélie pensa que son époux avait prit la décision de se séparer de l’animal, elle parût exténuée par l’attitude de l’homme qui feint l’étonnement et qu’elle interprétât comme une forme de déni.

On rapportât durant cette période, une augmentation de disparitions inquiétantes de chats et de petits chiens. Parfois, on retrouvait au méandre d’un bois, d’un fossé ou de terrains abandonnés, des fragments d’os, des corps d’animaux, principalement des mammifères, mais aussi parfois d’autres volatiles, déchiquetés à coups de serres et éventrés ou éviscérés. Bois-le-Roy fût alors frappé par ce qu’il convient d’appeler une psychose collective, que l’ont mit sur le compte d’un tueur en série d’animaux. Les gendarmes finirent par ouvrir une enquête devant l’accumulation de dizaines puis de quelques centaines de plaintes, dans les environs du Soissonnais. Les maîtres ne laissèrent plus sortir sans surveillance leurs félins, on ne détachait plus la laisse des chiens et on restait aux aguets, prêt à surprendre les gestes suspects de passants. Un enfant prétendit avoir été attaqué par un oiseau bleu et or, on considéra que le choc émotionnel subit par l’enfant et son imagination débordante constituaient une explication probante des traces de griffes retrouvées sur ses bras. La description « fantastique » de l’animal aux milles yeux et aux pupilles rouge sang, firent légèrement sourire les naturalistes de la région et l’on classa sans suite cet évènement.

Les semaines passèrent, la nuit parfois Serge se voyait réveiller par ses terreurs nocturnes et le bruit de coups de becs, contre les tuiles de la toiture de la demeure anglo-normande. Il se trouva particulièrement affecté par l’affaire de l’enfant que l’on n’avait pas cru et commença à ressentir un sentiment de culpabilité à son égard. Amélie lui suggéra de garder secret leur trouvaille, de crainte qu’on rejette sur eux, une éventuelle responsabilité. Il faut dire, à la charge de Madame Van Halen, que les soupçons se multiplièrent de toute part du sud de l’axonais, et jusqu’aux Ardennes belges, qu’une avalanche de dénonciations calomnieuses à l’encontre de voisins que certains « corbeaux » balançaient en pâturage, créèrent un climat de suspicion généralisé.

Les récents évènements avaient parfois conduit à quelques règlements de compte savamment portés, au prétexte de la vengeance d’un animal soi-disant tué par telle ou telle personne, se traduisant par une hausse de vandalisme, et parfois d’agressions sur fond d’alcool ou de problèmes psychiatriques. La psychose enflât encore et l’on assista cette fois-ci à un lynchage collectif perpétré à l’encontre d’un étranger, un roumain de la communauté Rom, qu’on accusât de sorcellerie et de sacrifices d’animaux, dans une commune rurale isolée. La victime échappa de peu à la mort et la tension atteint son paroxysme à ce moment.

Au cours d’un de ces derniers après-midis ensoleillés du début de l’automne, Amélie vît réapparaître Paon, qu’elle accueillit dans son écurie. L’animal se montra docile et déploya sa rouelle somptueuse encore plus dorée qu’auparavant. L’envergure de sa roue s’était encore amplifiée et le bleu profond du plumage encore davantage prégnant. Alors que les affaires d’animaux disparus parurent s’atténuer, les époux Van Halen offrirent des pièces de boucherie au paon, ce dernier sembla d’abord s’en contenter mais s’en dégouta vite et commença à tourner à proximité de la basse-cour de la propriété, dès que l’occasion s’en présentait.

Serge décida ce jour-là de mettre un peu d’ordre dans l’écurie et de la nettoyer. Le paon reprit sa parade hypnotique et il fît vibrer ses ocelles, tandis qu’un bruit de métallique parcourut son plumage. Il fut pris de convulsion et sa tête commença à lui tourner, au point qu’il perdit l’équilibre et se rattrapa à la poignée de la porte d’entrée de justesse, évitant la chute. Des papillons noirs tournoyèrent au-dessus de ses yeux et un cri perçant retentit à hauteur du perchoir. Les serres en avant, le bec près à s’abattre contre le crâne de son imposante proie, Paon saisit l’avant-bras droit de son maître en hurlant encore et encore. Des gouttes de sang giclèrent dans les yeux de Serge, qui à son tour s’époumona de toute son énergie, appelant à l’aide son épouse. Lorsqu’elle apparut enfin, elle assista terrorisée à l’attaque de son époux de la part du volatile, qui ne cessa d’assener de violents coups de griffes et de becs sur le bras de l’homme. Il réussit enfin à se protéger en se jetant en dessous d’une table rangée dans le petit bâtiment.

Paon cessa d’abattre toute sa rage sur l’homme et reprit une posture calme et disciplinée devant sa maîtresse. Il se baissa et donna l’impression de faire une révérence à Amélie. Serge lui balança alors une grosse pierre à l’arrière de la tête de la bête, qui hurla à nouveau. Ses yeux se remplirent de pourpre, un pourpre encore plus angoissant que précédemment et quand Amélie le frappa avec l’aide d’un manche de râteau, il piqua sur la pauvre femme qui chuta contre le sol et vît crouler contre tout son corps une avalanche de coups. Serge saisit l’animal par le cou et essaya de le lui tordre. La force du paon d’or l’empêcha de mener à terme sa tentative et l’animal replongea sur Madame Van Halen, qui cette fois-ci périt lorsque le bec heurta sa tempe. Les derniers coups de griffes dans la poitrine, les bras et le visage ne provoquèrent plus que quelques soubresauts nerveux de la victime. Serge accourut dans sa demeure avant d’en ressortir équiper d’une carabine. Le paon avait tenté de le suivre et au premier coup de feu s’échappa effrayé par le bruit. L’homme ajusta sa cible et au deuxième coup, atteint la créature qui s’effondra dans la cime des arbres. Une volée de plumes bleue flotta dans le vide, tandis qu’il tenta sans succès de réanimer son épouse.

Les secours embarquèrent finalement la dépouille de la victime, tandis que les gendarmes interpellèrent l’homme, condamné pour meurtre après quelques années de procès.

*

On raconte dans la région que l’homme mît un terme à ses jours lorsqu’au cours d’une de ses battues en forêt de Retz, il découvrit sous des roches un œuf blanc tacheté de points dorés. Quelques collectionneurs avertis entreprirent à leur tour d’effectuer des recherches, mirent la main sur une petite dizaine d’œufs dans la région qu’ils conservèrent à l’abri de la lumière, dans des espaces peu exposés à la lumière et à l’abri de regards indiscrets.

Vous avez aimé cette nouvelle 🙂 laissez moi un commentaire 😉 En revanche, je vous remercie de ne pas copier ou coller le contenu qui est directement accessible depuis ce blog 🙂 Merci à toutes et à tous .

« Home Sweet Home »

Pour l’écriture du roman fantastique Yolande, dont une partie de l’histoire se déroule dans la maison de la solitaire octogénaire dont le nom du livre est tiré, il fallait créer un cadre propice au déroulement de certains événements. J’ai la chance d’habiter une région dans laquelle de nombreuses vieilles bâtisses sont encore debout, dont certaines sont dans un état de délabrement avancé. La Picardie, est une région du nord de la France, qui a été à deux reprises ravagée par les deux Guerres mondiales. Dans certaines localités, se fût près de la totalité des bâtiments qui furent rasés par les tirs d’artilleries et les bombardements. Aussi, ce côté historique (mais aussi triste), m’a donné une certaine inspiration pour écrire Yolande.

La création de ce roman avait pour moi deux objectifs :

1-Reprendre l’écriture après une période « d’abstinence » (la fameuse angoisse de la page blanche n’y ait pas pour rien).

2-M’essayer à un genre que j’aime beaucoup : le fantastique.

L’univers torturé de Yolande s’inscrit dans la ville fictive et fantastique de « Mortcy », qui est localisée près du Chemin des Dames, de la ville de Laon (où débute d’ailleurs l’intrigue), de Soissons et de Saint-Quentin, dans l’Aisne. Dans cette région rurale et relativement isolée, la présence de nombreuses édifices religieuses, médiévales et aussi de « maisons de maître » en pierre de taille, laissent le promeneur solitaire songeur.

L’idée de l’écriture de Yolande m’est « naturellement » venue de ce manoir abandonné derrière son enceinte de pierres, d’herbes sauvages et ses ferronneries rouillées. Cette maison aux allures de lieu hanté, a fait germer dans mon esprit cette histoire.

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A très bientôt je l’espère 🙂

Yolande

RENTREE LITTERAIRE 2019 #concourskdp2019
Tu aimes les romans fantastiques et les histoires paranormales, découvre mon nouveau roman « Yolande » sur Amazon Kindle. 
Il est disponible en accès libre du 1er au 5 Septembre 2019 ! sur @kdpfrance (lien dans mon profil), sur KDP Select et aussi en version brochée.
Profites-en pour plonger dans l’univers de Yolande et n’hésite pas à partager autour de toi et à le commenter, si ce livre t’a plu. 
En lice pour le concours des Plumes Francophones 2019, dont la marraine est @aurelie_valognes, romancière connue notamment pour son « Mémé dans les orties » et dernièrement « La cerise sur le gâteau », « Yolande » aborde les thèmes du grand âge, du paranormal et de l’angoisse que procure en nous la mort. 
Tu as aimé mon roman, tu souhaites me soutenir, alors n’hésite pas à commenter, partager autour de toi et à m’identifier dans tes publications avec le hashtag #yolande2019 ! 
Bonne lecture à toi ! 
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Un deuxième roman publié cet été 2019

Dans un registre différent du premier roman que j’avais publié l’an passé, j’ai voulu m’essayer à un genre moins terre à terre : le fantastique.

Le roman Yolande prend racine dans la ville imaginaire de Mortcy, près de Laon et de Soissons et non loin du tristement célèbre Chemin des Dames. Cette région rurale du Nord de la France, ravagée par les deux Guerres Mondiales et par l’occupation allemande, est un lieu propice au mystère.

Quand la folie se mêle au paranormal et que l’ingratitude provoque la colère et le désir de vengeance, tous les ingrédients sont réunis pour créer une atmosphère sombre et terrifiante.

Bonne lecture à toutes et à tous !

Ce livre est accessible via KDP Select, n’hésitez donc pas à le consulter !

Yolande

Printemps 2003,

Yolande – quatre-vingt-huit ans – est sur le point d’être placée de force en maison de retraite par Samantha, son unique héritière.

Plongée dans la solitude et ses souvenirs, elle prétend vivre avec Aimée, sa sœur jumelle décédée au lendemain de la Première Guerre mondiale.

Alors que Samantha, Morgan et leur fils Jonas emménagent dans la demeure de la vieille dame, le malheur semble s’abattre sur la petite ville provinciale de Mortcy.

Et si Yolande, cette octogénaire aux prétendus dons paranormaux, était à l’origine des évènements frappant les environs ?

Sur les thèmes du grand âge, du paranormal et de l’angoisse que procure en nous la peur de la mort, j’ai pris beaucoup de plaisir à écrire ce récit sombre.

Après la publication en 2018 de mon premier roman « Le Collègue », thriller psychologique dont la trame de fond était axée sur les méfaits de pervers narcissiques en milieu professionnel, je souhaitais aborder un autre genre que j’affectionne particulièrement : le fantastique. 

Mon coup de coeur du moment : « Nous rêvions juste de Liberté », Henri Loevenbrunck

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« Nous Rêvions juste de Liberté » de Henri Loevenbruck.

Comme le titre l’indique, il est question ici dans ce roman de route, d’un thème fondamental de notre existence : la Liberté. L’amitié, l’amour, mais aussi la trahison sont des sujets abordés à travers le livre. L’intrigue débute rapidement, avec l’histoire d’un jeune adolescent de seize ans : Hugo, faisant la rencontre de trois autres jeunes à peine plus âgés que lui : Freddy, Oscar et Alex.

Divisée en trois carnets représentant trois étapes de la vie du narrateur, on plonge progressivement dans la vie de Hugo, basculant progressivement dans la délinquance, à mesure qu’il conquiert sa liberté. J’ai beaucoup apprécié la façon dont l’auteur à mis en place la trame de son récit, le déroulement de l’intrigue est vraiment intéressant et surprenant. A travers le parcours fascinant du personnage principal, on plonge dans le milieu des  MC : Motorcycle Club, les clubs de motards et du folklore tournant autour.

Une histoire pleine de rebondissements avec un dénouement à la hauteur du roman de Loevenbruck que je recommande à toutes et à tous.

Des personnages de fictions intrigants. Episode 2 : Tuco Salamanca et Gustavo Frings, de la série Breaking Bad.

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Série Américaine fêtant cette année ses dix ans, Breaking Bad, créée par Vince Gilligan, est une des plus abouties et des plus intéressantes, tant par la mise en scène de chacun de ses épisodes, que par la multitude de ses personnages hauts en couleurs. Pour ce second épisode, j’ai pris le parti de ne pas m’attaquer aux personnages principaux que représentent Walter White et Jesse Pinkman. Nous ne manquerons pas de les étudier au cours d’un prochain article d’ici quelques semaines.

Nous débuterons tout d’abord par Salamanco Tuco, puis ensuite nous nous pencherons sur Gustavo Frings. Deux protagonistes apparaissant à des niveaux de l’intrigue éloignés, deux personnalités fortes et pourtant diamétralement opposées. C’est tout l’intérêt de cet article.

Commençons par le mexicain au sang chaud, pour ne pas dire bouillonnant et excessivement surexcité : Tuco. Un nom pareil évoque déjà en soi une certaine force, un soupçon de western et de violence. Tuco est un trafiquant de drogue chevronné, pas spécialement cultivé, si on s’en réfère à son langage très fleuri et à sa vulgarité. En dépit de son niveau d’éducation très limité, il s’avère être un homme particulièrement avisé en affaires et malin, pour ne pas dire roublard. Très nerveux et toujours prêt à sauter à la gorge de son prochain, le narco-trafiquant s’avère être un psychopathe sans limite, aux réactions imprévisibles et dangereuses. Il est capable de tuer sous le coup de la colère et ne ressent absolument aucune empathie pour autrui. C’est un individu détestable, et pourtant on réussit à s’y attacher. Il apporte beaucoup de vitalité et de force à l’intrigue, même si Tuco quitte rapidement la série. Ses accès de colère et son sarcasme en font un ennemi terriblement impitoyable et drôle. Il prétend avoir des dons divinatoires et voir l’avenir. C’est aussi un accroc à la drogue qui aime dominer ses semblables.

Comme nous pouvons le constater, ce qui rend ce personnage bon, c’est cette succession de caractéristiques parfois étonnantes et qui donnent du piment aux épisodes dans lequel il apparaît. Véritable bête noir du duo d’associés maladroits que sont Walter White, dit « Heisenberg » et Jesse Pikman, son imprévisibilité le rend difficile à cerner et insaisissable. C’est un personnage qui termine mal, tué rapidement par le chef de police Hank Schrader au cours d’une fusillade. Même mort, l’ombre de Tuco Salamanca refait rapidement surface, par l’apparition de membres du cartel venus rendre leur justice.

Nous n’entrerons pas davantage dans l’histoire, afin de ne pas trop « spoiler » le récit. On peut considérer que ce personnage n’évolue pas vraiment au cours de ses apparitions. Il est déjà bien atteint par ses crises de paranoïa et il est sur les dents dès son entrée en scène. Il se contente simplement de manifester un certain respect pour « el Señor Heiseinberg », cuistot réputé pour sa méthamphétamine presque pure, en guise de changement de comportement. Il arrive donc parfois qu’un personnage important ne reste toujours ce qu’il est, malgré les épreuves s’opposant à lui.

Autre ennemi juré du duo de « Pieds Nickelés » de Breaking Bad, l’effroyable Gustavo Frings. Le nom évoque quelque chose de froid, de rigoureux. Gustavo est un homme d’affaires aux multiples activités, qui est par la suite présenté comme un mystérieux Chilien ayant fui son pays d’origine, sans doute au cours de la dictature. C’est un homme métisse, qui dégage une certaine élégance, tant par son savoir-vivre que par sa sollicitude. Il porte des lunettes rondes et souvent un costume, notamment lorsqu’il travaille dans l’un des restaurants de sa chaîne de fast-food : « Los Pollos Hermanos », les « Frères Poulets ». Son activité officielle lui sert de couverture pour protéger ses affaires de narco-trafiquant bien plus lucratives, mais illégales. C’est un homme qui aime pouvoir tout contrôler et qui agit avec méthode et stratégie. Il aime planifier ses activités jusque dans les moindres détails et ne supporte pas l’imprévu et la prise de risque inutile. C’est un de mes personnages préférés, car il incarne le mal par excellence et parce qu’on apprend au fil de l’histoire qui est vraiment Gustavo Frings. Il apparaît d’abord comme un homme faible et parfois même craintif, il s’avère être le plus froid et le plus machiavélique des personnages de la série.

Ce protagoniste fin aux multiples facettes, très intelligent et en bien des points semblable à Walter White, est un adversaire de taille. Se livrant à une véritable partie d’échec où tous les coups sont permis, y compris les plus bas et le plus vils, l’évolution de Gustavo s’avère être « négative ». A son apparition, il semble être en mesure de tout contrôler, d’être maître de lui-même et de la situation, vers la fin il ressort moins fort et plein de doutes. Sans aucun doute, le « chimiste » a-t-il compris les points faible de Gustavo Frings.

Je synthétiserai le devenir de Gustavo de la sorte :

Plein d’assurance, gère ses affaires, se développe (début) + Épreuves (Guerres de territoire, guerre intestine, enquêtes policières) = Piégé, incapable de se dépêtrer, effondrement (fin).

Je terminerai cet article simplement, en disant que Breaking Bad a été et est d’ailleurs toujours, l’une de mes sources les plus inspirantes pour la création de mes personnages. La recherche de l’intrigue « organique », pour reprendre le terme de John Truby, notamment dans L’anatomie du scénario , se ressent en bien des points. Rien n’est laissé au hasard, cela va jusque dans les moindre détails. Rares sont les séries à être capable de mettre en scène des personnages aussi mauvais (je parle moralement), et de les rendre empathiques aux yeux du spectateur, avec des personnalités et des attitudes si différentes. Pour les fans de films de gangsters, mais aussi celles et ceux qui aiment l’aspect psychologique d’une intrigue, Breaking Bad est une série qui mérite d’être vue.

Sam Atticus.